Dans le train qui nous emmène à Yogyakarta, nous retrouvons Chloé et Romain : ça c’est de la coordination. Ils ont l’air bien en forme, mieux que lorsque nous les avions quittés à Jakarta où Romain a eu un gros pic de fièvre. Nous partageons un taxi à l’arrivée pour trouver notre guest house. Celle qui Wahyu nous a recommandé est un poil chère et surtout, ne propose que des dortoirs. Nous errons un peu et Chloé rentre au culot à Tropis Homestay qui semble complètement au-dessus de notre budget. En réalité, en partageant une chambre de quatre, nous arrivons à un prix très correct pour un confort au top et une piscine ! Nous nous rafraîchissons lors d’une longue baignade, discutons, et partons découvrir les environs pour le repas du soir. Nous sommes vraiment dans LA rue touristique de la ville, c’est-à-dire une grande allée d’hôtel et de restaurant pratiquant des prix indécents pour le pays. Au hasard, nous croisons un petit vendeur ambulant qui fait des soupes et nous dégustons donc un repas du soir à soixante-dix centimes par personne, sous le nez des touristes qui en paient entre cinq et dix. Ravis, nous rentrons pour une délicieuse nuit de sommeil.

Le lendemain, nous prévoyons un petit tour des environs à pieds. Nous croisons quelqu’un qui nous conseille un endroit moins cher et agréable pour découvrir l’artisanat Batik, une méthode de coloration des tissus. Il nous trouve même des cyclo-pousses, qu’il négocie pour un prix dérisoire. Et nous voilà replongeant joyeusement dans le piège à touristes. Les batiks sont indéniablement beaucoup moins chers qu’ailleurs mais le commerce n’a pas grand-chose d’authentique. Le guide parle un anglais impeccable et à tendance à nous forcer un peu la main si nous avons le malheur d’admirer une toile de trop près. J’ai un gros coup de cœur pour une tenture, que je négocie ardemment. Je suis devenue intraitable en négociation, alors quand le vendeur commence par me dire que les prix sont fixes, je lui réponds d’un air malicieux que rien n’est fixé en Asie … et le tour est joué ! Nous baladons ensuite dans la ville, qui n’a vraiment aucun intérêt. A bout de force, nous échouons dans un restaurant de luxe à moitié vide où nous mangeons un plat basique. Il fait chaud et très humide, le temps est menaçant alors nous entamons le chemin du retour. Chloé se sent faible, pas très bien et lorsqu’elle prend sa température, le thermomètre indique trente-huit et demi. Romain non plus n'est pas vif, ils doivent couver quelque chose. Une bonne baignade dans la piscine, un film et nous voilà tous couchés pour prendre des forces avant Borobudur, cité mythique de Java.

Au réveil, il faut plier bagages avant de prendre le bus. Chloé est patraque mais elle va mieux. Romain lui est plutôt dans la pente descendante. Lorsque nous arrivons aux alentours de midi, il a de fortes douleurs dans le bas du dos qui lui irradient dans les jambes, sa température est presque à trente-neuf cinq. Je fais rapidement le lien : pic de fièvre, amélioration et à nouveau pic de fièvre … la dengue a encore frappée ! Les symptômes sont caractéristiques : manque d’appétit, douleur dans les jambes, migraines. Ils sont cloués au lit. Alors pour leur laisser une chance d’apprécier leur lever de soleil sur les ruines, nous décalons la visite d’un jour. Demain nous irons visiter les alentours de la ville en scooter, sans eux s’ils ne sont pas en état. Le reste de la journée est donc au sport, à l’écriture et au repos pour François et moi.

Au réveil, je suis svelte comme une athlète ! Rien de glorieux malheureusement, j’ai eu la tourista. François ne tarde pas à suivre mon exemple, mais dans l'ensemble, nous allons très bien. Par contre, nos deux amis sont au fond du trou. Ils ont peu dormi, luttant contre la fièvre, les douleurs dans les jambes et le mal de tête. Ils sont inaptes à sortir de la chambre pour aujourd’hui, et nous ne comprenons pas par quel miracle François et moi échappons encore à cette sale maladie. Croisons les doigts et badigeonnons-nous d’anti-moustique. Nous louons un scooter et allons repérer les alentours. Nous tournons un peu en rond et admirons le paysage. Ici, il y a beaucoup de culture du tabac sur un arrière-plan de chaine volcanique. Nous avons d’ailleurs renoncé à grimper la deuxième montagne de feu, n’ayant ni envie de dépenser tant d’argent ET d’énergie pour un volcan qui rechigne à nous montrer de la lave. Nous roulons jusqu’à un village de poterie. Malgré le côté authentique du lieu, l’activité poterie est très déroutante. La femme nous reçoit et sans parler un mot d’anglais, nous montre comment faire un bol, nous aide à en faire un et nous demande de payer le ticket. Un peu sur notre faim, nous décidons de nous balader dans le village. C’est très agréable. Nous sommes en fin de matinée, certains habitants reviennent du champ avec des ballots d’herbe fraiche pour le bétail. Quelque chose qui ressemble à de la paille brûle en plein cœur du village et nous marchons même jusqu’à une jolie rivière en passant devant une belle vache et son veau. Nous rentrons pour vérifier l’état de Romain et Chloé. Ils sont encore dans le pire de la maladie, avec une once d’amélioration. Nous les approvisionnons en eau pendant la journée. De notre côté, la digestion est toujours un peu difficile alors nous décidons de nous reposer pour cet après-midi tout en prenant soin des deux malades. Nous finissons la journée par un petit restaurant, Chloé et Romain allant un peu mieux, et par un petit film. Nous avons peu de temps de sommeil car nous avons prévu de faire le lever de soleil à Borobudur, temple bouddhiste classé patrimoine mondial de l’UNESCO.

Se lever à trois heure trente, ce n’est pas vraiment agréable. Je jette un coup d’œil dehors, le ciel est clair et plein d’étoiles, nous ne pouvons pas reculer ! Alors nous voilà à quatre heure du matin, à marcher dans la rue pour rejoindre la réception du site et grimper les marches du temple pour admirer le soleil se lever. Au début, l’ambiance est magique. Une lueur brille au loin, le soleil se prépare et nous voyons scintiller les lumières de tous les villages dans la plaine. Mais rapidement, la sérénité et la beauté du lieu est gâchée par les touristes qui affluent. Ils sont des centaines, appareil photo à main, à mitrailler sans se soucier de personne autour d’eux. Il me faut bouger sans arrêt pour arriver à prendre des photos sans une grosse tête en premier plan. Nous aurions aimé contempler en silence, en laissant la lumière baigner progressivement le paysage, mais c’est un fantasme de voyageur qui ne peut pas se réaliser dans ce genre de lieu. Contrairement à Bagan au Myanmar et à Angkor au Cambodge, ici il n’y a qu’un temple et pas des dizaines d’hectares de ruines. La foule est donc concentrée au même endroit et ne respecte absolument pas les consignes qui interdisent de s’assoir ou de monter sur les ruines … sous le nez des gardiens dont on ne comprend pas bien le rôle. Pour trente euros l’entrée par personne, la pilule est un peu dure à avaler mais passée la déception, nous reconnaissons que ce levé de soleil était magnifique et que ce temple est une vraie merveille.
Autour de sept heure, il nous faut rejoindre l’hôtel pour prendre un taxi et rejoindre Yogyakarta. Chloé et Romain voudrait arriver tôt au service d’immigration pour faire leur extension de visa. Comme en voyage rien ne se passe jamais comme prévu, déposer leur dossier leur prendra deux heures au lieu des quinze minutes prévues. Le chauffeur acceptera même d’attendre contre une petite augmentation du tarif. Nous arrivons enfin dans le même hôtel qu’à l’aller, Tropis Home Stay, pour deux jours de visite avant de rejoindre Surabaya.