Les frontières commencent à se dissoudre entre nous et les autres. Devenons-nous donc différents au bout de quatre mois et demi, à arpenter l’Asie du Sud Est ? Très souvent il n’y a pas de mots communs pour échanger avec les locaux, pourtant de plus en plus, nous tissons des liens, l’espace de quelques instants. Nous avons trois heures de bus jusqu’à Kampong Thom, mais au bout d’une heure, c’est la panne ! Nous voilà tous sur le bas-côté pendant que chauffeur et co-pilote mettent les mains dans le moteur qui fume … Au bout de trente minutes, nous repartons mais sans climatisation ! Nous sommes peu dans le bus, il y a un groupe de gens qui voyage ensemble : des mères et leurs enfants. Il y a un bébé de sept mois et il est trempé de sueur. Nous commençons par échanger nos places pour que la mère et son bébé soient devant la seule trappe par laquelle rentre un peu d’air dans le bus. Nous échangeons des regards, le bébé attrape mes doigts en essayant de les mettre à la bouche. Puis la femme qui semble être la grand-mère insiste pour que je le prenne dans mes bras. Me voilà donc dans un bus branlant, sans climatisation, à tenir sur mes genoux un petit garçon de sept mois qui me jauge de ses grands yeux noirs. La famille est hilare, on prend des photos, on essaie de se parler sans y parvenir. Le temps s’arrête. Ce jour-là en descendant du bus, tout le monde nous dit « bye-bye » !

Nous trouvons une superbe petite Guest House. Mis à part que nous n’avons pas la climatisation dans la chambre, c’est le grand luxe : frigo, ventilateur, bouilloire, eau chaude …


Nous n’avons qu’un jour de visite dans cette petite ville complètement délaissée par les chemins touristiques. Pourtant, à trente kilomètres d’ici, se trouve un site de temples préangkoriens. Une centaine de temples sont disséminés dans la jungle. François prend son courage à deux mains, et nous louons un scooter pour nous rendre sur les lieux. Il n’y a pas de modèle automatique au Cambodge alors le loueur est obligé de lui faire un petit cours ! Nous ne sommes pas très rassurés mais François prend vite le coup de main et nous voilà parti sur les routes pour de nouvelles aventures. Visiter en deux roues donne une sensation de liberté grisante. A l’arrière, j’ai le temps d’admirer le paysage et de graver chaque détail. Le voyage jusqu’aux temples est déjà une visite en soi. Nous laissons passer des troupeaux de vaches et nous évitons des véhicules roulant à contre sens, le tout dans un paysage luxuriant. Je ne crois pas avoir déjà vu de vert si vert, si pur qu’il en est presque fluorescent. Il me tardait que se finissent les paysages brulés par la saison sèche, mais je ne m’attendais pas à autant de couleurs et de contrastes. Les lumières de la mousson sont magnifiques. Le temps est imprévisible et nous réserve de belles surprises. Ce matin, le ciel est d’un bleu incroyable. Nous visitons les ruines à l’abris des arbres, sans presque rencontrer personne, dans le bruit régulier des cigales ! Oui, il y a des cigales en Asie, deux ou trois fois plus grosses que nos copines provençales. Ces constructions datent d’avant Angkor, elles ont donc toutes environ mille cinq cent ans et elles sont tellement bien conservées. Encore une fois, nous admirons le travail de la nature qui ajoute sa touche artistique aux pierres. Les ficus étrangleurs détruisent les temples autant qu’ils les maintiennent, c’en est poétique.

Nous rentrons pour manger au marché de la ville et achetons notre dose de fruits pour le prochain petit déjeuner. Vers quinze heure, nous repartons en vadrouille sur notre scooter pour une fin d’après-midi au temple Phnom Santuk. Le ciel se grise au fur et à mesure que nous roulons. Arrivés au pied des huit cent marches, l’orage menace déjà. Nous montons d’un bon pas, maintenant les escaliers interminables ne nous effraient plus, nous sommes rodés à la marche. Les arbres cachent une partie du panorama mais les temples dorés se découpent sur le ciel sombre. En contre-bas du temple, nous trouvons un magnifique point de vue. Nous dominons toute la plaine alors que tombent quelques gouttes de pluie envolées dans le vent de l’orage. Nous redescendons en hâtant le pas mais nous parviendrons jusqu’à l’hôtel sans presque prendre une goutte. Lorsque nous sommes enfin propres de notre longue journée, le ciel nous réserve une surprise inoubliable. Un extraordinaire coucher de soleil embrase le monde…

Immersion
dans le monde Cambodgien à scooter garantie dans cette vidéo !