Nous arrivons à Kompong Chnang en fin d’après-midi et nous découvrons notre Garden Guest House : un véritable havre de paix ! C’est grand jardin très bien entretenu, couvert de fleurs et de petits recoins avec des hamacs. On en oublie qu’il y a des murs, des chambres et des bâtiments, tellement l’ambiance est à la nature. Il y a des petits dictons peint sur des planches en bois entre les buissons et contrairement à beaucoup d’hôtels de ce genre, nous ne sommes pas dans un repère de fumeurs de joints. L’hôtel est à l’écart de la ville, juste assez pour être dans une rue très peu touristique où l’on trouve de tout à des prix raisonnables. Nous sommes vraiment au cœur de la vie, dans une rue jalonnée de petites échoppes qui vendent des fruits, des bouteilles d’eau et des doses de shampoing à l’unité ! Les enfants se précipitent pour nous dire « Hello » dans des cris de joie et les adultes sont curieux et bienveillants. Nous ne sommes ni des bêtes de foire, ni des porte-monnaie ambulant et croyez-nous : ça fait un bien fou !

Nous avions déjà profité de beaux rayons de soleil à Phnom Penh, mais en nous levant ce matin, nous découvrons un temps radieux ! A huit heure, nous partons en tuktuk pour le port sous un ciel d’un bleu profond ponctué de petits nuages blancs. Cette ville est réputée pour ses villages flottants, mais pas encore autant que sa voisine Kompong Luong, c’est pourquoi il y a si peu de touristes. Le chauffeur nous fait passer par des petits détours et nous fait découvrir des villages sur pilotis, pour le moment à trois ou quatre mètres du sol, mais qui seront bientôt au ras des eaux après quelques semaines de mousson. François le courageux goute quelques criquets, mais je suis trop froussarde pour m’y risquer. Le chauffeur nous montre les pièges que mettent en place les familles pour les capturer et comment elles les font rire pendant de longues heures en les assaisonnant avec du piment et de l’ail. Nous traversons aussi un village spécialisé dans la production de piment séché. Nous arrivons ensuite à l’embarcadère où une dame nous attend pour le bateau. Nous avons demandé un petit bateau avec des rames pour pouvoir aller au cœur des villages flottants. Les deux heures sur l’eau sont un véritable enchantement. Des maisons, des écoles, des magasins et mêmes des jardins flottent sur l’eau du Tonlé Sap. Pourtant, nous sommes toujours heurtés par les habitudes que nous retrouvons partout en Asie : pas le moindre souci pour l’environnement. Il ne s’agit pas ici de chercher chez les habitants une conscience écologique mais simplement un peu de bon sens. Ils vivent sur l’eau, ils vivent de l’eau. Ils y font leur lessive, s’y lavent et pourtant nous les voyons jeter leurs déchets par-dessus le balcon, souiller et détruire l’écosystème duquel ils dépendent. Ça reste pour nous une des grandes aberrations du Sud-Est Asiatique.

Encore une fois, nous terminons notre journée en nous perdant dans le marché de la ville. C’est un plaisir et un défi. On met les pieds en tongue dans des substances inconnues, on sent des odeurs qu’on aurait préféré ne jamais découvrir, on commande un plat qu’on aurait préféré ne jamais découvrir et pourtant on en prend plein la vue. On achète des fruits délicieux pour une bouchée de pains, on mange à côté des locaux sous leurs yeux ébahis, on rigole à ne pas se comprendre, on regarde et on emmagasine tellement de choses qu’il semble difficile de les décrire. La journée a été magnifiquement ensoleillée jusqu’au bout et les deux heures de barques sans protections me laissent des souvenirs rougeoyant sur les bras. En fin d’après-midi, la mousson reprend ses droits, l’orage gronde au loin et le rideau de pluie détrempe la ville. On apprend même à aimer entendre la pluie revenir pour apporter un peu de fraicheur.