Nous démarrons à Muang Khua les quatre heures de bateau qui doivent nous conduire jusqu’à la petite ville fluviale de Muang Ngoy. Nous embarquons à neuf heure trente avec un couple de Français et trois Israéliennes. Nous glissons sur le Nam Ou en bavardant avec nos nouveaux amis ! D’une chose à une autre, nous passons de la perma-culture et des initiatives alternatives à la charcuterie. Les voilà qui nous sortent une grosse pièce de Coppa et nous font profiter de leurs réserves de viandes ! Nous sommes donc sur un bateau, dans des paysages magnifiques, à refaire le monde en mangeant de la charcuterie. Alors que le paysage se transforme en apiques calcaires, nous voyons apparaitre la belle Muang Ngoy, perdue dans une nature puissante et sauvage. Nous débarquons et nous découvrons une toute petite ville, avec une seule rue centrale … boueuse ! Le village n’est accessible que par l’eau, aucune route ne la relie au reste du Laos. Cet isolement nous fait nous sentir dans un endroit magique. Du balcon des restaurants ou de notre Rainbow guest house, nous pouvons voir le Nam Ou couler paisiblement. Le temps s’arrête.

Au petit matin, nous nous installons à la terrasse d’un restaurant, au plein cœur du village, pour petit déjeuner. Je goûte une spécialité d’ici : le Frarang roll. Il s’agit de banane et de beurre de cacahuète enroulés dans du riz collant et saupoudré de graines de sésames. Bref, c’est délicieux. Nous assistons au jour qui se lève et à l’activité de tous les Laotiens dans la rue. Tout le monde est déjà d’attaque pour faire l’aumône aux moines, pour aller travailler dans les champs ou ouvrir son échoppe. Il n’est pas encore sept heure mais ici la journée a déjà commencé. Tout autour, les montagnes sont encore noyées dans la brume mais doucement le soleil semble percer à travers.  

Nous entamons notre marche à sept heure trente en prenant la direction des terres. Une meute de chien du village nous a suivi et provoque un remue-ménage pas possible. Ils finissent par se disperser pour qu’il n’en reste plus qu’un, qui nous accompagnera pendant nos trois heures trente de marche. Nous sommes à nouveau au cœur d’un paysage somptueux entre rivières, rizières et falaises karstiques. Sur notre route, un petit pont nous permet d’accéder à une étendue de champs où des laotiens sont occupés à planter du riz. La lumière inonde cette étendue d’eau qui reflète les silhouettes et les montagnes. Encore une fois, nous sommes émues devant la beauté du spectacle. Nous poursuivons en passant la grotte de Tham Kang, très petite, d’où jaillit l’eau d’une source. Nous sommes vraiment dans un autre monde, coupé du reste du Laos et seuls dans l’immensité de la vallée. Le village de Ban Na, à la clef de ces six kilomètres de marche, est d’une authenticité à couper le souffle. Même s’il y a une ou deux guest house pour la période touristique, tout porte à croire que ce village évolue hors du temps. Les oies, les canards, les poules, les vaches et les chiens se comptent par dizaines ; les enfants se lavent dans la fontaine du village ; une dame tisse sous le haut-vent d’une maison pendant que d’autres travaillent dans les rizières… Alors que nous prenons une pause le long de la rivière, un vieux monsieur nous demande de l’aider à porter des bambous. Nous nous exécutons timidement, c’est tellement difficile de se comprendre ! Nous repartons ensuite pour regagner notre hôtel … Sous un soleil de plomb.

A l’esthétique de cette ballade s’ajoute la joie du soleil retrouvé et aux plaisirs des rencontres ! Nous faisons la connaissance dans l’après-midi de Margaux et Manon, en voyage pour trois mois en Asie. Elles semblent avoir les mêmes aspirations que nous en terme de voyage, le feeling passe très bien et nous les aidons à peaufiner leur parcours avec des petits conseils sur nos coups de cœur au Laos et au Cambodge. Après une bière et un plat de nouille, nous nous effondrons comme les poules à vingt et une heure ! C’est épuisant de profiter pleinement de l’instant présent…